jeudi 30 octobre 2008

Le chemin

Juste avant le congé de Toussaint, je me suis rendu en visite à l'école pour revoir mes collègues et apporter quelques dictionnaires qui encombraient mes armoires: ils se rendraient plus utiles aux élèves, en classe.
Outre ce moment privilégié de veille de vacances, le vendredi midi est, en général, un moment calme, sans les surveillances des autres midis, nous l'avions d'ailleurs choisi depuis quelque temps pour partager un gâteau entre nous. Probablement le seul moment où nous pouvions nous retrouver, l'institution scolaire n'ayant jamais prévu la nécessité de faire de réunion d'équipe, nous le faisions informellement et de façon conviviale.

Me voilà donc à retrouver ce chemin tant de fois parcouru. La gare de mon village, les correspondances et ces escaliers, ces couloirs, ces quais tant de fois arpentés, la petite gare à 10 minutes de l'école et le reste parcouru à pied... comme d'habitude!
Je retrouve des tas de souvenirs, ces petites rues d'un quartier cossu puis l'avenue Circulaire qui borde le parc du domaine de l'Observatoire, cette belle avenue que j'ai pu voir dans tous ses états: sous la pluie, dans la nuit, à l'aube ou déjà ensoleillée selon les saisons. J'y ai si souvent croisé les mêmes joggueurs, la même étudiante qui déboulait d'une rue de traverse en allumant sa cigarette, quelques chats dont un, horrible souvenir, s'est fait écraser devant mes yeux et, autre victime de la route: un renard écrasé au milieu de l'avenue; mais aussi, infiniment plus léger, le souvenir des écureuils se jouant de la pesanteur et courant sur le tronc des arbres aussi facilement que sur les branches puis sautant agilement d'un arbre à l'autre. A la fin de l'hiver, le martèlement du pic épeiche qui résonne dans les profondeurs du parc.
J'y ai senti des odeurs d'humus, de champignons, de plantes non identifiées ou identifiées comme le très caractéristique ail des ours.
J'ai vu des ciels superbes, la Lune sous tous ses aspects, de majestueux vols de hérons...
Ainsi, la route du travail peut recéler de véritables cadeaux qui éclairent, sinon la journée, au moins les premières heures.
Le plus beau souvenir date un peu: les astronomes prévoyaient une pluie d'astéroïdes à une date donnée mais une pluie telle que – disaient-ils - ce moment était proportionnellement à « la nuit des étoiles » comme un feu d'artifice comparé une luciole. En me levant, la veille, mon regard tombe sur une étoile filante puis une autre et encore une. C'était fantastique, je n'en avais jamais vu autant! Après ma douche, c'était toujours la fête, là haut... Je prends le chemin de l'école, ça continue. Les astronomes s'étaient trompés d'un jour et je suis un des privilégiés à avoir profité de l'événement. Aucun collègue n'avait rien remarqué. Le lendemain, date officielle, il n'y avait plus rien à voir.

J'ai rarement pu partager ces plaisirs. D'abord parce que je faisais ce trajet seul et puis parce que mes collègues ne semblaient pas partager le même chemin que moi ni le même ciel.
Pas de hérons, dans leur monde ni ail des ours ni croissant de lune; pas de pic épeiche, pas d'écureuil, pas d'étoiles. Eh bien, vous me croirez ou non, mais je préfère mon monde au leur!


Les trois photos ont été prises avenue Circulaire:
  • un banc chaque année envahi d'herbes folles;
  • lever de soleil sur l'avenue;
  • champignon attaquant un arbre. Ce dernier s'est abattu un an et demi après sur la maison devant laquelle il était, rongé à la base par les champignons
On peut cliquer sur les photos pour les voir en grand format

vendredi 10 octobre 2008

Le Vilain Petit Canard

(cet article fait suite au précédent)

C'était une de nos élèves de deuxième. Une véritable petite peste!
Elle avait un caractère de cochon: arrogante, méchante, blessante...
Elle a raté son année et, Comme nous ne ne savions pas quoi faire d'elle et de son dossier disciplinaire épais comme un annuaire, elle fut mise à la porte.
L'année suivante, dans une autre école, elle ne fait pas mieux.

La dernière fois que je l'ai vue, peu après son départ de chez nous, elle était donc dans son autre école mais un matin, elle est revenue dans la classe des ses copines, chez "nous" pour chahuter et, surveillant la sortie, je lui dit, une fois de plus, en la voyant sortir la cigarette à la main, qu'on ne peut pas fumer dans l'école; elle me répond "Ta gueule, t'as plus rien à me dire, je ne suis plus dans cette école de merde."

Après ses deux deuxièmes, elle suit une filière d'enseignement/stage mais ne garde son emploi que deux ans, toujours aussi invivable et exigeante vis à vis de son employeur.
Que peut-on bien faire avec quelqu'un comme ça?
Que pourrait-elle devenir?

Il y a quelques semaines, je reçois une demande d'amitié sur Facebook. C'est elle.
Elle a 20 ans maintenant. Elle n'a qu'un CEB: un Certificat d'Étude de Base, c'est à dire un papier qui atteste qu'elle a réussi ses études ...primaires.

Elle me raconte son parcours dans de longs messages avec une belle langue et sans faute d'orthographe. C'est un plaisir de la lire, non seulement pour la fluidité de son expression mais surtout pour son histoire. Je ne suis plus du tout en face de cette enfant insupportable mais devant une jeune femme qui me parle d'elle – la petite fille - presque comme d'une autre personne avec une maturité que beaucoup pourraient envier, avec une belle clairvoyance.
De plus, elle porte encore le fardeau de la honte par rapport à cette petite chipie qui n'a pourtant plus rien à voir avec l'adulte qu'elle est devenue.
Que s'est-il passé? Je l'ignore si ce n'est qu'un jour elle a eu un déclic, elle s'est rendu compte qu'elle n'arriverait nulle part, qu'elle se sabotait elle-même et elle s'est extirpée de cette exécrable gamine. J'ignore encore si cette seconde naissance fut aisée ou le fruit de grands efforts mais le résultat est spectaculaire et son rêve serait d'arriver à se réinsérer dans le circuit des études pour avoir un diplôme de psychologue afin d'aider ...les jeunes!

Je ne dis pas tout ce qu'elle m'a confié, je voulais juste évoquer ce contact qui est un des plus beau et émouvant que Facebook m'ait offert. En y pensant, je songe aussi à A. dont je parle au début du blog: A. a aussi connu ce moment particulier, ce déclic où tout bascule et où la révolte, la colère, l'agressivité ou l'opposition et la provocation font place à un comportement plus harmonieux, plus juste.

Nous avons tous probablement connu chez nous-même ces sauts de maturité; pour certains, cela se fait tout en douceur, chez d'autres tout d'une fois.


Cela me fait penser à des cas plus dramatiques et notamment à ce jeune homme, Adam, qui en a tué un autre, Jo, pour lui voler son "MP3". Qui sait si lui aussi ne connaîtra pas ce déclic où ses yeux s'ouvriront sur l'horreur de son propre geste? Peut-être est-ce déjà arrivé avant même l'issue du procès. Ce n'est peut-être plus un meurtrier qu'on a jugé et condamné mais un repenti prêt à tout pour, à défaut de réparer l'irréparable, essayer de consacrer le reste de son existence afin que d'autres "Adam" évitent de se fourvoyer dans l'horreur.

L'histoire récente ne manque pas d'exemples de personnes qui ont eu soudain cette clairvoyance et sont sortis du "milieu" pour se consacrer à la jeunesse délinquante afin de lui ouvrir les yeux, pour extraire à leur tour un maximum de ces jeunes de la petite ou grande criminalité avant qu'ils ne commettent l'irréparable.


Dans mes dernières lectures, j'ai trouvé de tels exemples: Matthieu Ricard cite ce dangereux repris de justice soudain animé de compassion au cours de son incarcération et puis Patrick Henderickx , dans ses récits autobiographiques: « Les Trois marches » et « Parole Donnée » se montre lui-même un repenti

Je remercie la personne principalement concernée par cet article de m'avoir permis d'évoquer son histoire sans même désirer changer une virgule

Facebook

Certains de mes collègues s'étaient fait membre de la grande communauté Facebook. A en parler, ils ont éveillé ma curiosité. Je me suis inscrit il y a quatre mois sans trop savoir l'intérêt de le faire sinon, par exemple, de voir les photos du bébé d'une collègue.

Pour ceux qui ignoreraient encore en quoi consiste Facebook, disons pour résumer que c'est un site où on s'inscrit sous son vrai nom. D'anciens amis peuvent donc vous retrouver et vous-même en retrouver, il faut alors faire la démarche de proposer votre "amitié" et si l'autre accepte, vous faites partie de leur cercle d'amis, vous avez accès aux données qu'ils veulent bien laisser sur l'Internet: goûts artistiques, école fréquentée, opinion politique ou religieuses, différentes choses qui les caractérisent ou rien du tout; des photos, aussi...
J'ai moi-même retrouvé d'anciens amis dont j'avais perdu la trace depuis des années avec grande joie. Facebook est un bel outil.

Je suis donc devenu l'ami de quelques collègues puis des élèves de l'école et des anciens m'y ont vu et ont commencé à me demander également d'être leur ami. Et ça n'arrête pas.

Voilà donc que, depuis quelques semaines je suis submergé d'"amitié" d'élèves et d'"anciens" qui me témoignent leur sympathie et cela fait chaud au coeur de lire, pour certain leur reconnaissance de ce que je leur ai apporté et qui dépasse ce que je pouvais soupçonner. Mon épouse a trouvé la formule: "cela donne un sens à ma carrière" et je leur témoigne ma gratitude pour me l'avoir exprimé avec tant de chaleur.

D'un autre côté, ces contacts prolongent la relation scolaire, celle qui s 'arrête si abruptement une fois... notre "mission" remplie, après la rhéto pour la plupart d'entre eux, quand cela commence à devenir réellement passionnant.

Je retrouve donc des étudiants qui poursuivent leur voie (pas toujours très linéaire, mais qui se rapprochent alors de leur vocation plus authentique) D'autres se trouvent déjà plongés dans leur vie professionnelle. Certains ont des parcours prestigieux d'autres modestes mais ce n'est pas cela qui fait la valeur de l'homme ou de la femme qu'ils sont devenus et je vous parlerai peut-être bientôt avec autant de sympathie et d'admiration d'un réalisateur de long métrage que d'une employée de supermarché qui, tous deux, ont pris contact avec moi.

mercredi 3 septembre 2008

Le "caractériel" (!)

C'était en 1982 ou 83. Je travaillais dans un athénée renommé d'un quartier aisé de Bruxelles. Dans cette école la discipline n'était pas un gros souci mais, comme partout, nous devions quelquefois remettre les pendules à l'heure avec certains élèves.

Cette fois-ci, c'était C. qui avait dépassé les bornes. Était-il agressif? Odieux? Irrespectueux? Vulgaire? Un peu tout cela? Je ne sais plus, il y a 25 ans... Mais je me rappelle très bien avoir été le trouver et après mes remarques, avoir entendu cette réponse que je n'oublierai jamais: "...mais c'est normal, je suis caractériel"

Fantastique! Tout s'explique: Monsieur est caractériel! Et bien sûr, dès lors, il faut accepter que Monsieur soit colérique, violent, irrespectueux, imprévisible, grossier, vulgaire... c'est normal: il est caractériel!

Voilà une étiquette bien pratique qui lui permettra de rester toute sa vie un handicapé social déresponsabilisé des bêtises qu'il pourrait commettre ou dire.


Nous avons tous nos qualités (nos facilités) et nos défauts (petits ou gros handicaps) et notre responsabilité n'est pas vraiment engagée dans ce que nous avons reçu à notre naissance mais, saperlipopette! notre responsabilité est franchement engagée en ce qui concerne notre évolution dont nous sommes maîtres.

Et je suis quelque peu perplexe face aux personnes qui lui ont permis de penser que LUI, C. EST caractériel plutôt que de lui dire qu'il avait un COMPORTEMENT de caractériel. Cette nuance lui aurait permis de s'attaquer plus facilement à ses faiblesses. On combat plus facilement ses défauts que soi-même!

jeudi 28 août 2008

Le Cadeau


Quelquefois, on s'attend à recevoir un cadeau mais c'est avec un peu d'appréhension qu'on se demande quel cadeau ridicule risque de se présenter et on s'inquiète d'avoir à faire bonne figure devant la généreuse personne qui, pleine de bonnes intentions, vous a choisi ce ramasse poussières un peu kitsch, cet objet inutile, ce livre inintéressant...

Dans "mon" athénée, il est de coutume que les collègues offrent un cadeau personnel aux grandes occasions: mariage, naissance, maladie de longue durée... et de départ à la (pré)retraite.

A quoi devais-je m'attendre?...

...à une fantastique surprise!

Les deux livres que j'ai reçu correspondent totalement à ma sensibilité philosophique, à des centres d'intérêt qui n'ont pas grand chose à voir avec l'école (quoique...) mais que mes collègues ont su percevoir. Ces livres, j'aurais pu les désirer si je les avais vu à l'étal d'un libraire. Mes collègues - ou, en tout cas leur délégué - les ont trouvés pour moi et me les font découvrir.

Ce cadeau prouve, s'il le fallait encore, qu'au delà des relations purement professionnelles, en arrière plan, se tissent d'autres relations tellement plus personnelles!

Je vous remercie sincèrement et chaleureusement pour ces cadeaux mais aussi, tout au long de ma présence parmi vous pour ces instants fugaces d'une parole attentionnée, d'un regard complice, d'un partage, d'un geste bienveillant, tout cela qui rend plus léger la journée de travail et la carrière.

P.Z. En ce dernier jour de carrière


Pour info, je vois que ce "post" est daté de jeudi par "Blogspot".
Il a, en réalité, été déposé vendredi matin vers 8h
, mon dernier jour de travail à l'Athénée

vendredi 15 août 2008

Le vrai du faux

Pour continuer à propos de la triche, une élève (appelons-la «B.») me rappelle cette mésaventure qui lui est arrivée en première, il y a déjà quelques années.

Le néerlandais n'était pas son cours de prédilection et elle y éprouvait de sérieuses difficultés mais selon toute probabilité, B. était le genre d'élève dont la mémoire était un atout dans certains cas: elle a appris à peu près par cœur un texte travaillé en classe dans l'espoir qu'il lui serait utile d'une façon ou d'une autre à l'examen.

Elle répond donc tant bien que mal aux différents exercices puis arrive la rédaction. De mémoire, elle jette sur une feuille de brouillon le texte vu en classe pensant pouvoir en utiliser la structure, même, peut-être, des phrases entières, pour reconstituer un semblant de rédaction qui puisse lui rapporter quelques points. Comme je le disais: en néerlandais, B. est plus à l'aise dans la restitution que dans la création.

Mais voilà que le surveillant-éducateur qui surveillait... c'est à dire un certain Papa.Zoulou. en ramassant les copies, constate la présence d'une feuille un peu bizarre dans le bloc de B. Il y regarde de plus près et voit qu'il s'agit d'un texte qui n'a pas vraiment de rapport avec l'examen: ce n'est pas le sujet de la rédaction, la couleur d'encre était même différente, si mes souvenirs sont exacts. Bref, cela ressemblait furieusement à une feuille qu'on aurait glissé là pour l'utiliser pendant l'examen, comme font tant d'élèves peu scrupuleux.

C'est donc convaincu par cette interprétation des faits que je ramasse les feuilles de B., l'examen et, bien sûr la feuille litigieuse, pour les remettre au professeur avec mes commentaires (j'ai toujours laissé le professeur décider du tarif des sanctions, lorsque je surveille).

B. est désespérée, elle m'explique, insiste, ne sais plus quoi faire pour me convaincre et à bout de ressources, pleure devant le déshonneur de l'échec cuisant prévisible.


C'est bien simple: je me trouve si souvent en face d'élèves qui nient l'évidence alors que ce que j'ai vu ne prête absolument pas à confusion, quand, p.ex. j'ai vu un échange de feuilles, que je constate la différence d'écriture et remonte à l'auteur de la feuille retrouvée chez un autre. Ou à la récréation: «Ce n'est pas moi qui ai jeté ça par terre / qui ai craché...» ...ou encore à l'étude quand je demande le silence, l'élève que je vois et entends clairement «mais non, Monsieur, je ne parle pas!»

A la faute quelquefois bénigne s'ajoute le mensonge et l'élève se décrédibilise. D'ailleurs, il est peu «psychologue»: il ne fait qu'énerver le prof ou le surveillant qui risque de le sanctionner davantage.

Mon premier réflexe a donc été de m'accrocher à mon interprétation des faits et de croire que B. me racontait des histoires pour sauver son examen.

Mais, quand même...

Je finis par douter. Et si elle était de bonne foi? Moi-même, quand j'étais élève, n'ai-je pas été victime de trompeuses apparences? Je retourne voir le professeur pour lui faire part de ma perplexité devant la version de B. finalement pas moins plausible que mon interprétation.

B. qui me rappelle cet épisode me dit que, finalement, ça s'est arrangé, son professeur l'a crue ou, à tout le moins, lui a accordé le bénéfice du doute. La façon dont B. me raconte l'anecdote aujourd'hui a achevé de me convaincre de sa bonne foi, mais pourquoi ais-je eu tant de mal à la croire, en ramassant son examen?


Ce sont les mensonges souvent assénés froidement les yeux dans les yeux qui me rendent d'office méfiant devant tout ce que peut me dire un élève. Non, je ne vous crois plus d'office et il est bien dommage que les élèves honnêtes pâtissent ainsi de l'attitude d'autres qui n'hésitent pas à me faire avaler leurs salades... enfin qui essayent!

vendredi 8 août 2008

Interrogation écrite!

Il m'a assez souvent été demandé de surveiller des examens ou des interrogations écrites voire même être assesseur à des examens. Le souvenir le plus insolite est celui de cet oral de Français à la lueur des bougies, un matin de décembre: le jour n'était pas encore levé et la panne électrique du local pas encore résolue. Quelle belle ambiance pour évoquer les Romantiques!


En ce qui concerne les écrits, c'est franchement ennuyeux. Je peux essayer de repérer les gauchers et les compter: deux ou trois par classe, les statistiques se vérifient mais cela ne remplit pas les deux heures d'un examen voire la matinée...

Une tâche importante est d'empêcher les élèves de tricher. Un jeu où la vigilance de l'un doit déjouer les ruses des autres.

J'ai donc essayé de donner aux élèves honnêtes la conviction que la triche ne paye pas, pour cela il me fallait empêcher les manœuvres louches et il est délicat de faire la part des choses: un regard de côté est souvent une curiosité de voir si le voisin s'en sort aisément, un peu plus appuyé, cela peut être une «recherche d'inspiration»! Mieux vaut prévenir que guérir et éviter les situations ambiguës d'une feuille un peu trop au milieu de la table, par exemple.

Les techniques ne manquent pas, j'ai moi-même été témoin d'échange de papiers (échange de brouillons, de petits coins déchirés, jusqu'au jet hardi d'une boulette de papier; cours ouverts sur les genoux, feuilles de cours sous la feuille d'examen ou parmi les feuilles destinées aux brouillons, feuille de brouillon couverte de notes à peine lisibles au crayon dur, jusqu'au petit résumé miniaturisé. Dans ce cas, notons les progrès de la technique qui permet, via la photocopieuse ou l'imprimante, de les réduire à souhait tout en les multipliant à l'envi pour les copains; encore faut-il pouvoir les utiliser adroitement et les faire disparaître à la première alerte. A ce propos, je me rappelle cette élève «imbuvable» qui, en me voyant venir, a fait disparaître son «copion» derrière sa ceinture, carrément dans son slip avec une attitude de défi comme pour me dire « ...et là, vous viendrez le chercher? »

Souvenir plus récent: cette fille de rhéto parmi une soixantaine d'élèves dans un grand local, surprise au téléphone en plein examen de physique: « C'est ma maman » me dit-elle ingénument tout en s'accrochant à son GSM s'offusquant que je puisse vouloir le lui confisquer.

Il va de soi que je n'incite personne à en faire autant, si je vous le raconte, c'est parce que j'ai pu surprendre ces quelques faits (et je ne les cites pas tous)

Quand je tombe sur un fait de tricherie, que je ramasse une preuve compromettante ou que je dis que je rapporterai les faits au professeur dont je surveille l'examen, il n'y a aucune agressivité dans mon expression, «tu as essayé, ça a raté»; parfois même un peu d'humour émaille mes propos sans doute pour désamorcer la gravité de la situation mais j'ai sincèrement de la peine de voir la détresse de celui ou celle qui mesure les conséquences tragiques que ses actes auront sur l'évaluation de son travail. Même si j'ai essayé de ne rien en laisser paraître, j'ai souvent eu le cœur touché devant les supplications, les promesses de ne plus recommencer, les larmes...


D'un autre côté, j'admets fort bien avoir pu laisser passer nombre de tentatives réussies. Allez, vous avez terminé, moi, je ne suis plus dans l'enseignement, vous pouvez bien me confier une anecdote où vous pouvez vous vanter de m'avoir bluffé!

C'est à vous d'évoquer vos souvenirs!